posté le 31-12-2011 à 13:38:21
Maria Lambour
Maria Lambour. La Bretagne incarnée
Ma Bretonne de l'Année 2011 Maria Lambour, la Sud-Finistérienne qui a fêté ses 100 ans.
La Bigoudène est le symbole vivant de notre Bretagne et elle est désormais la seule à porter la coiffe tous les jours.
Elle n'a pas vendu d'albums, n'a rien découvert, ni défilé sur des podiums.
C'est juste une femme ordinaire au destin finalement extraordinaire.
La petite Maria Le Berre, née il y a un siècle aux confins du pays bigouden, a été élue Bretonne de l'année par la rédaction du Télégramme.
Le pays bigouden peut être fier.
Une centenaire, avec son sacré caractère, et qui aurait pu être Miss France en 1929, a été élue Bretonne de l'année par la rédaction du Télégramme.
Les yeux encore de braise, l'art de la coquetterie - "Elle n'est pas de travers, là, ma coiffe ?" - à faire sourire le photographe : une drôle de dame, Maria Lambour.
Qui, gloire et beauté, et toute mise sur son 31 en cette veille de réveillon, reçoit à l'heure du café-pain-beurre avec un oeil malicieux, en se demandant bien pourquoi (ou en faisant semblant de le faire), elle est ainsi couronnée.
Et en s'interrogeant d'abord, sans verser dans le cliché : "Combien j'ai gagné ? Un bonbon ?". Combien ? Rien, Maria.
Juste le respect dû à votre grand âge et à ce que vous incarnez de la Bretagne d'hier et de demain.
Et au pire, un sachet de bonbons qu'on vous apportera. Parce que les fleurs, c'est périssable.
Une femme ordinaire
Elle a 100 ans, Maria Le Berre, dite Kerguen, mariée puis veuve Le Maréchal, plus connue sous le nom de Lambour.
L'identité, quand on est née aux confins du pays bigouden, n'est pas forcément dans le nom.
Elle est dans ce que les gens sont.
Maria Lambour, Bretonne de l'année, c'est l'occasion de rendre hommage à une femme ordinaire, au destin devenu extraordinaire.
L'Ile Chevallier, à Pont-l'Abbé, en 1911, n'était pas à proprement parler cet endroit bucolique qu'on aime aujourd'hui admirer.
La petite Maria qui, au demeurant, n'a guère grandi, naît dans un monde qui va connaître la guerre. Puis une seconde.
Rapidement veuve, Maria Le Maréchal vit sa vie de femme et de mère ordinaire. Tient sa boutique, sert des verres, du sans-plomb et de l'ordinaire. Laisse sa coiffe grandir sans céder à la mode de la ville, "mod' giz ker".
Jusqu'à devenir, à 100 ans, star de publicité, objet de curiosité parfois déplacée et, surtout, la dernière des Bigoudènes à porter, au quotidien, la grande coiffe. "Moi, le matin ? D'abord le café et après, je mets ma coiffe. Enfin, ça dépend, des fois aussi, je fais l'inverse", sourit-elle, naturellement. Naturellement parce que c'est ainsi, que ça l'a toujours été et que ça le sera jusqu'au bout.
Hommage aux femmes
Maria Lambour, Bretonne de l'année, c'est aussi, même si l'on peut penser l'inverse, sortir des clichés et dire, une nouvelle fois, que la Bretagne est bien vivante.
Si des générations ont vécu dans la crainte de revendiquer leurs racines, les cercles celtiques font désormais le plein de danseuses et de danseurs, pour des créations qui finissent par tutoyer l'art contemporain.
Les bagadoù se remplissent, au point que la fédération des sonneurs peine à fournir des formateurs.
La musique bretonne, s'affranchissant des carcans du traditionnel, explore, aujourd'hui, des territoires electro, voire punks, qu'on lui pensait interdits.
La Bigoudène, aussi, est l'image de marque de la région, notamment grâce au succès d'À l'aise Breizh.
Mais au-delà, rendre hommage à Maria Lambour, c'est aussi rendre hommage aux femmes de Bretagne.
Elle a vécu deux guerres, est devenue veuve.
Elle a connu les transformations du monde.
Elle n'a rien inventé, rien créé. Juste vécu.
Mais elle n'a jamais baissé la tête, ne s'est jamais décoiffée devant l'adversité.
Simplement, sincèrement.
En cela, Maria mérite d'être Bretonne de l'année, pour le symbole mais aussi pour l'exemple de fierté et d'exigence qu'elle incarne. Et qu'elle transmet aujourd'hui, presque malgré elle.
Marc Revel